mercredi 21 décembre 2011

The Green Mile - Stephen King



Titre VF: La Ligne Verte


Paul Edgecombe était autrefois gardien dans le bloc E du pénitencier de Cold Mountain. C'était son rôle et celui de quelques autres, de garder les criminels condamnés à mort avant leur exécution et de les mener finalement à la chaise électrique, au bout de la Ligne Verte. Aujourd'hui en maison de repos, Paul Edgecombe revient sur un événement de cette époque qui a bouleversé sa vie: l'arrivée de John Coffey, condamné à mort pour le meurtre des jumelles Detterick, l'immense John Coffey, qui a peur du noir et s'exprime de façon si simple et énigmatique. Paul Edgecombe se souvient des événements étranges ou terrible qui ont environné cet homme avant qu'il ne remonte la Ligne Verte...

Ayant adoré le film tiré de ce livre, qui est magnifique, j'avoue que j'appréhendais beaucoup en commençant le roman, étant donné que j'ai d'habitude un peu de mal avec Stephen King dont je trouve le style trop « bavard » et les intrigues trop longues à se mettre en place. Autant dire que j'ai eu une magnifique surprise avec cet ouvrage que j'ai dévoré et adoré de bout en bout. Je pense que le format particulier du livre, publié sous forme de six feuilletons, a aussi contribué pas mal au fait que l'auteur entre relativement vite dans le vif du sujet et que l'histoire garde un certain rythme tout au long du récit.

Pour commencer là dessus, même s'il a depuis été publié sous forme d'un tome unique, il est bon de connaître ce découpage initial, pour comprendre la manière dont est structuré le récit tout au long de l'intrigue. Les différentes parties suivent en effet un schéma similaire, mettant en regard la vie de Paul Edgecombe dans sa maison de retraite, et le récit qu'il consigne de ses souvenirs de Cold Mountain, chacune faisant écho à l'autre, au niveau des personnes rencontrées ou des détails du passé qui resurgissent. Le contexte dans lequel écrit Paul Edgecombe ne tient pas seulement lieu de cadre propice à la remémoration, mais renvoie systématiquement au passé, contribuant à renforcer l'énigme qui plane non seulement autour de John Coffey, mais également autour de l'ex-gardien du Bloc E. Ainsi, chaque partie s'achève sur un cliffhanger, et la suivante commence systématiquement sur une narration dans le présent de Paul Edgecombe, avant qu'il ne reprenne son récit. Cette introduction rappelle à la fois les éléments dont il a été fait mention à la fin de la partie précédente, souvent de manière assez introspective mais renvoie également implicitement par avance à des éléments futurs. Lire ce livre en s'attendant à une construction linéaire est donc un peu risqué, puisque chaque début de partie est un rappel de la précédente, parfois assez long, qui reprend généralement mot pour mot à l'endroit où l'on s'était arrêté précédemment.

Cette façon de faire sans arrêt des retours du présent au passé et du passé au présent font partie des raisons qui m'ont fait apprécier ce livre, car l'auteur ne cesse de semer des indices dans le texte sur les événements qui vont suivre, et cela crée un suspense assez soutenu, même lorsque l'on sait déjà ce qu'il va se passer. D'autant que cela s'ajoute à la manie qu'a Stephen King de triturer toujours un peu la chronologie, qui m'agace parfois, mais que je trouve ici très bien menée. Même si le récit s'ouvre sur l'arrivée de John Coffey au bloc E, on revient ensuite en arrière, bien avant, pour pointer quelques éléments qui vont avoir de l'importance par la suite, tout en plantant le décor du bloc E, ses occupants, aussi bien les détenus que les gardiens et leurs réactions diverses face à la délicate situation de l'exécution d'un homme, attitude qu'ils devront tous remettre en question avant la fin.

J'ai aimé la façon dont le sujet était traité par Stephen King, et le regard de Paul Edgecombe sur ses prisonniers, un regard qu'il essaye de rendre neutre malgré les crimes qui les ont amené là. Il n'y a pas d'excès, ni dans la diabolisation des détenus, ni d'apitoiement sur leur triste sort, simplement le fait, dont tous prennent acte, qu'il s'agit avant tout d'être humains, dont l'exécution approche. Le regard du lecteur est lui-même volontairement neutralisé par celui d'Edgecombe, qui souligne parfois le contraste entre l'horreur des crimes commis et l'humanité qu'il perçoit par ailleurs chez les détenus, et dont il fait preuve lui-même envers eux. C'est d'autant plus évident que Percy Whetmore, jeune parvenu arriviste, fait preuve d'un mépris non dissimulé pour les condamnés, n'hésitant pas à les traiter comme des rebuts de l'humanité, et à leur faire sentir qu'ils ont bien mérité ce qui leur arrive. Ce personnage est d'ailleurs antipathique pour cette raison du début à la fin, malgré la légère nuance apportée par Edgecombe qui, à plusieurs reprises, évoque la jeunesse du personnage (sans pour autant chercher à l'excuser complètement.)

Pour parler du principal, enfin, j'ai trouvé le personnage de John Coffey ("like the drink, only not spelled the same way") incroyablement touchant. Même s'il est au cœur du récit, paradoxalement, j'ai trouvé qu'il intervenait concrètement, en tout cas avant la fin, assez peu. Mais chacune de ses interventions est un moment clé du récit, qui en révèle un peu plus sur ses capacités extraordinaires et fait naître chez le lecteur la même question que chez Paul Edgecombe: est-ce qu'un tel homme peut réellement être un meurtrier? Du début à la fin, sauf en quelques occasions mémorables, John Coffey a l'air totalement détaché du monde, comme absent, et lorsqu'il s'exprime c'est d'une manière touchante, presque enfantine. Ce n'est qu'à la fin que tout cela est expliqué, mais rétrospectivement cela rend le personnage encore plus tragique, car soumis à une force qui est à la fois une bénédiction et une malédiction. J'avoue avoir versé une larmichette sur la fin, en grande partie d'ailleurs à cause de l'ambiguïté de sa signification (mais je ne dis rien pour ne pas spoiler ceux qui n'auraient ni lu le livre ni vu le film.)

Bref, malgré mes réserves initiales à l'égard de Stephen King, ce livre a vraiment été une claque, et même une très belle claque que j'ai été heureuse de découvrir. J'ai très envie maintenant de revoir le film qui, malgré mon souvenir assez lointain, respecte très fidèlement l'oeuvre.

Dix-neuvième lecture dans le cadre du Baby challenge Fantasy, ce qui me laisse à terminer le premier tome de l'Epée de Vérité pour le boucler... mais vu mon avancement de lecture en ce moment, c'est pas gagné XD.

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