mardi 27 février 2018

Captive Prince, book 1 - C.S. Pacat



Damen est un héros pour son peuple et le légitime héritier du trône d'Akielos. Mais lorsque son demi-frère s empare du pouvoir, Damen est capturé, dépouillé de son identité et offert comme esclave au prince d'un royaume ennemi.
Beau, manipulateur et létal, son nouveau maître, le prince Laurent, incarne ce qui se fait de pire à la cour de Vere. Mais dans la toile mortelle de la politique Vérétienne, les apparences sont trompeuses, et lorsque Damen se retrouve pris dans un jeu de pouvoir pour le trône, il doit s'allier à Laurent afin de survivre et sauver son royaume.
Sans jamais oublier une règle vitale : cacher sa véritable identité à tout prix. Car l'homme dont il a besoin est celui qui a le plus de raisons de le haïr...

Comme souvent, avec les livres étiquetés "romance", je dois bien avouer que je ne partais pas totalement confiante. Je me méfiais un peu du postulat de départ : avec tout le foin autour de 50 Shades, j'avais un peu peur que le roman ne dépeigne les relations abusives et le sexe non consenti comme ingrédients d'une véritable "romance", mais heureusement, Captive Prince ne tombe pas dans le piège (pas pour l'instant, en tout cas.) J'ai trouvé au contraire que l'autrice insistait très bien sur la "trahison" du corps, qui peut avoir une réaction purement physiologique à un stimulus extérieur, sans aucune notion de désir ou de plaisir. La violence est assez crue en plusieurs endroits, mais elle n'est pas "romancée", même lorsqu'elle est subie par le personnage principal, et comme c'est ce que je craignais, j'ai été rassurée (enfin, si on peut dire...)

Bref, une fois, cet écueil évité, le roman est vraiment chouette ! Il m'a rappelé Kushiel, notamment dans la géographie et les échos à notre monde réel que l'on retrouve dans l'univers fictif de C.S. Pacat. Impossible de ne pas rapprocher Akielos (du moins, le peu qu'on en sait) d'une Grèce Antique fantasmée, les seules informations que l'on ait à son sujet étant sa discipline militaire et sa pratique de l'esclavage (proche de l'esclavage antique, donc). Quant à Vere, on y retrouve un peu un mélange de France moderne opulente et d'Empire romain décadent. Les noms des personnages eux-mêmes les rattachent très clairement à ces points géographiques et historiques : Damianos, Kastor ou Jokaste à Akielos, Laurent, Nicaise ou Ancel à Vere. On peut généralement déterminer l'origine d'un personnage rien qu'à son nom (ce qui est plutôt pratique, il faut l'admettre.)

Cependant, l'intrigue n'est pas tant bâtie sur le développement de son univers (somme toute assez classique) que sur ses personnages, les principaux évidemment, mais aussi ceux qui gravitent autour d'eux, à la cour. À ce niveau, personnellement, mon petit cœur a battu pour Erasmus, encouragé (plus ou moins) par le petit texte bonus consacré à ce personnage à la fin du roman (même si, mine de rien, le fait qu'il soit un esclave sexuel rend toute son histoire un chouïa malsaine, quand même). Il n'a pas un rôle primordial dans le récit, en tout cas, pas un rôle actif, mais son personnage est tellement doux, délicat et entièrement dénué de méchanceté et de rancoeur qu'il donne envie de lui faire des câlins, de faire en sorte que jamais rien ne lui arrive, et de casser la figure de quiconque voudrait lui faire du mal, par la même occasion (ce qui est malheureusement plus courant qu'on ne le pense.)

Enfin, au delà de la romance annoncée (et qui, si l'on voit se profiler des indices est encore bien loin, visiblement) les intrigues politiques et la façon dont elles se répercutent sur les relations entre les personnages tiennent très efficacement en haleine du début à la fin. Tout d'abord, il y a Damen, le prince d'Akielos, qui marche sur des œufs dans un environnement hostile, pour ne pas se faire reconnaître d'un homme qui veut sa mort. Cela l'oblige à une passivité, voire à une soumission souvent frustrante, et la relative liberté de mouvement qu'il acquiert dans la deuxième partie est plus que bienvenue. Dans ce premier tome, cela dit il n'est jamais réellement mis en danger à ce niveau, jamais réellement sur le point de voir son identité révélée. On le voit plutôt prendre ses marques dans cet environnement qu'il ne connaît pas, reconnaître de qui il doit se méfier, à qui il peut faire confiance (jusqu'à un certain point) et user à son avantage des tensions qui existent à la cour, dans la limite de ses moyens.

Et de l'autre côté, on a Laurent, qui est probablement le personnage le plus ambigu du roman. Sans être particulièrement aimable (<< euphémisme du siècle : il est infect) il est pourtant étrangement fascinant, notamment pour son côté détaché, très froid et calculateur, en contraste avec la débauche bestiale qui semble être monnaie courante à Vere. Rien ne semble l'émouvoir, et l'on se surprend progressivement à vouloir percer la carapace et comprendre ce qui le pousse à agir comme il le fait. Tout au long du roman, on entrevoit petit à petit des explications, et l'on comprend peu à peu comment l'environnement dans lequel il vit a modelé son caractère et aiguisé sa perception de ce qui l'entoure. Il fait partie de cette catégorie de personnages qu'on voudrait pouvoir détester cordialement, mais auxquels on trouve quand même le moyen de s'attacher malgré soi (c'est vrai que je n'ai pas envie d'aimer Laurent, mais bon... il faut quand même admettre qu'on l'aime mieux vivant que mort, le bougre.)

On pourrait se demander comment une romance va pouvoir s'installer entre ces deux personnages, étant donné ce que Laurent fait subir à Damen, mais dans ce premier tome, en tout cas, il n'en est absolument pas question (on se doute bien que ça va arriver, hein, mais là, clairement, on n'en est pas encore là). Damen et Laurent sont deux personnages qui se haïssent mutuellement et se retrouvent forcés de collaborer pour des raisons diverses. Pour Laurent, Damen n'est qu'un représentant méprisable de la nation à qui il doit la mort de son frère, et partant de là, il n'a aucun scrupule à lui faire subir les pires humiliations. A aucun moment, les horreurs subies par Damen ne sont présentées comme faisant partie d'un jeu de séduction, même si c'est de la part d'un futur love interest (il me semble important de faire cette distinction, dans la mesure où je n'y ai pas vu d'apologie de la violence ou des relations non consenties, non plus qu'une négation du viol masculin, comme j'ai pu le lire ailleurs.)

Bref, malgré mes réserves initiales, j'ai beaucoup aimé cette lecture, et je suis curieuse de savoir ce que l'avenir réserve à Laurent et Damen, surtout vu la manière dont se termine ce premier tome. On y trouve des choses très dérangeantes (les viols a répétition, la pédophilie, l'omniprésence de l'esclavage sexuel, et même de l'esclavage tout court) mais il ne m'a pas semblé que c'était un aspect glorifié par l'auteur, plutôt un moyen d'accentuer le côté décadent et dégradant de la société de Vere, qui ironiquement, se considère comme civilisée par rapport à Akielos. Et finalement, notamment dans la deuxième partie du roman, les intrigues politiques et le développement des relations entre les personnages prennent un vrai relief, et il devient difficile de reposer le roman avant de l'avoir terminé. Je vais enchaîner sur le tome 2, en espérant que cette bonne impression se confirme !

Un livre lu dans le cadre du challenge Coupe des Quatre Maisons


1 commentaire:

  1. Bon me voilà plus que jamais avec l'envie de lire ce roman … et comme il est dans ma PAL, ça ne saurait tarder ;)

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