samedi 30 septembre 2017

The Once and Future King - Terence Hanbury White




En pays de Grimoirie, le tout jeune Arthur rencontre un jour Merlin et commence auprès de lui un apprentissage des plus anticonformistes... Moins qu'à la politique et aux armes, le futur roi s'initie aux secrets de la nature et aux mystères du monde animal dans une cascade de métamorphoses : il est ainsi changé en poisson, en blaireau ; il apprend le langage des faucons et leurs règles de vie ; se trouve confronté à la société guerrière et totalitaire des fourmis, face à l'univers pacifiste et libre des oies sauvages ! Autant d'initiations à la liberté, à l'indépendance et à l'adresse, en attendant de trouver Excalibur, la fameuse épée dans la pierre...

J'ai déjà lu, et chroniqué ici, le premier tome de cette intégrale qui en compte cinq. A l'époque je l'avais lu en français, cela fait donc un petit moment. Cette fois, j'ai relu ce premier tome, et enchaîné les suites dans leur version originale, et je pense avoir encore plus apprécié cette lecture que lors de ma première découverte.

Je ne vais pas revenir sur mon avis sur le premier tome, car mes remarques restent à peu de choses près les mêmes, si ce n'est que les digressions techniques ou historiques qui m'avaient semblé ralentir le rythme du récit à l'époque, m'ont beaucoup moins dérangée ici. Elles me semblent faire partie intégrante de la manière de raconter de White, qui aime bien les digressions d'une part, et qui souvent (un peu comme Jules Verne, d'une certaine façon) donne beaucoup de détails sur les us et coutumes de l'époque qu'il décrit, afin que l'on saisisse bien tous les enjeux de l'intrigue. Par ailleurs, il se sert beaucoup de la légende arthurienne (notamment dans le premier et le dernier tome) pour introduire une réflexion sur la société de son époque et l'homme en général, ce qui s'explique aussi par le fait qu'une grande partie de la saga ait été composée durant la Seconde Guerre Mondiale. Le cinquième tome, tout particulièrement, représente moins un chapitre de l'histoire d'Arthur qu'une parenthèse réflexive sur la nature humaine, menée par Merlin et les animaux que l'on a croisé dans le premier tome.

Si les premier et dernier tome se démarquent du reste de la saga (par leur composition, plutôt que par leurs thèmes, car cette question de la nature humaine et de la difficulté à dompter ses tendances belliqueuses sous-tend l'intégralité de la série), les trois autres, en revanche, sont un peu plus homogènes, et relatent de manière relativement chronologique les règne d'Arthur, depuis ses débuts, avec les réflexions (largement inspirées par Merlyn) qui ont mené à l'instauration de la Table Ronde, jusqu'à la déchéance et la chute finale, dont les graines sont semées dès les premiers chapitres, à  l'image d'une tragédie grecque. On suit principalement les conflits causés par la faction d'Orkney et les fils de Morgause (parmi lesquels Gawaine et Agravaine, le premier étant un personnage un peu rustre mais que l'on apprend à apprécier au fil des tomes, et le second un pervers méprisable dès le début) mais aussi et surtout les heurs et malheurs de Lancelot, un personnage que l'on suit de très près tout au long du troisième tome, The Ill-Made Knight, qui lui est consacré (et qui est le plus long des cinq.)

Lancelot est, par ailleurs, un personnage que je n'apprécie pas plus que cela dans la légende. Dans la plupart des versions que je connais, il est représenté soit comme le chevalier parfait et sans défaut (à part ce petit chapitre malheureux avec la reine Guenièvre, donc...) soit comme un traître détestable (ce qui est un peu exagéré à mon avis). J'ai beaucoup aimé en revanche, la représentation qu'en fait White : chez lui, Lancelot n'est pas un personnage parfait, ni même totalement condamnable, mais il est au contraire un homme torturé, avec des pulsions sadiques qu'il s'efforce de gouverner et de faire taire en tâchant d'appliquer ses principes de chevalerie avec d'autant plus de rigueur que cela ne lui vient pas naturellement. On s'attache énormément au Lancelot de White, pour lequel on ressent très facilement de l'empathie (j'ai cru comprendre en lisant la postface que White lui-même avait prêté au personnage des traits de son propre caractère, ce qui explique peut-être la tendresse sous-jacente que l'on peut ressentir pour lui à la lecture).

Ce qui m'avait marquée, à la lecture du premier tome, était principalement l'humour qui imprégnait tout le récit, un humour qui allait parfois jusqu'à l'absurde et qui rappelait irrésistiblement par moments celui de Pratchett. Il est intéressant de noter que cet humour, s'il est toujours présent dans la suite, disparaît peu à peu au fur et à mesure que la tragédie arthurienne se met en place. Le second tome, qui pose les bases de la destinée d'Arthur, est également le théâtre d'une comédie hilarante durant laquelle, entre autre choses, les chevaliers Grummore et Palomides se déguisent en Bête Glatissante pour remonter le moral du roi Pellinore (ce qui donne bien évidemment lieu à des situations de pure bouffonnerie.) Dès le troisième tome, ces interludes cocasses disparaissent, l'humour devient plus diffus, moins absurde, et l'on sent bien que les choses deviennent plus sérieuses pour Arthur et ses chevaliers de la Table Ronde.

Le tout dernier tome est celui qui m'a vraiment laissée le plus perplexe, notamment parce qu'il reprend des passages du premier (les métamorphoses animales de la Verrue/Arthur). Ces passages étaient à l'origine absents du premier tome, mais y ont été intégrés par la suite, ce qui rend un peu confus le déroulement des événements (sachant que la place de ces passages ne donne pas le même sens à l'histoire d'Arthur selon qu'il ait vécu ces métamorphoses avant de devenir roi, ou à la fin de sa vie : cela signifierait soit qu'il a reçu l'éducation de Merlyn dans son enfance, mais n'en a pas tiré les enseignements nécessaires, soit que cette partie de son éducation lui a manqué pour gouverner, et que Merlyn y remédie, mais trop tard...) C'est un peu dommage car, il s'agit justement des passages que je trouvais les plus intéressants dans le premier tome, la société orwellienne des fourmis, et le mode de vie utopique des oies sauvages. Mais d'un autre côté, le lecteur peut décider lui-même laquelle de ces deux versions fait le plus sens. Dans le dernier tome, cela donne en tout cas lieu à des réflexions très intéressantes (quoique parfois un peu fantaisistes) et cela apporte une assez bonne conclusion à l'ensemble, même si c'est un peu pessimiste.

Bref, je suis contente d'avoir lu l'intégrale de ce classique de la fantasy. Si j'avais trouvé le premier tome plutôt sympathique, j'ai vraiment été conquise par l'oeuvre dans son ensemble où l'on assiste de bout en bout à la grandeur et à la chute d'Arthur, dont le premier tome ne constitue qu'un prélude, finalement. Le seul bémol est cette confusion apportée par le cinquième tome, qui donne un peu l'impression d'une oeuvre pas totalement achevée, mais qui ouvre en tout cas sur des réflexions plus générales, expliquées notamment par le contexte d'écriture. J'ai aimé que l'on y trouve un mélange d'un peu tous les styles : essai, tragédie, comédie, épopée, science-fiction même, et l'écriture de White, directe et souvent incisive, est plaisante du début à la fin.


Un livre lu dans le cadre du challenge La Face cachée des Disney
(Merlin l'Enchanteur est une adaptation du premier tome : The Sword in the Stone.)


Et dans le cadre du challenge ABC - Littératures de l'Imaginaire





2 commentaires:

  1. bon, je crois que je viens de découvrir quel devrait être ma future lecture pour le challenge! Il ne me reste qu'à mettre la main dessus...

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    1. Ah, je suis contente si mon avis t'a donné envie :D J'espère qu'il te plaira autant qu'à moi ^^

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